Déforestation de l’Amazonie : la fuite en avant d’Envol Vert
La chronologie des attaques d’Envol Vert contre le groupe Casino interpelle à bien des égards. D’abord concentrées sur le Brésil, les accusations de l’ONG ont ensuite glissé vers la Colombie à partir de mai 2021.
Un basculement soudain que pourraient expliquer les liens organiques qui unissent l’ONG au groupe Carrefour, lui aussi mis en cause sur le sujet de la déforestation au Brésil. Un revirement qui, par lui-même, semble signaler une stratégie de la fuite en avant, le rapport utilisé par l’ONG pour attaquer le groupe Casino sur ses activités colombiennes ayant mobilisé un témoin qui s’est rétracté par la suite.
Entre proximités confinant parfois au conflit d’intérêts et caractère très sélectif des enquêtes menées, il apparaît que dénonciations d’entreprises par les ONG environnementales soient parfois moins légitimes qu’il n’y paraît, voire soient sujettes à caution.
Envol Vert et les dénonciations du groupe Casino : une chronologie qui interroge
En 2019, Envol Vert a débuté sa campagne contre le groupe Casino au sujet de la déforestation en ciblant ses activités au Brésil. L’ONG pointait du doigt un lien indirect entre la filiale brésilienne de Casino (GPA) et un fournisseur qui aurait vendu de la viande issue de la déforestation à JBS, fournisseur de GPA. Le groupe Carrefour étant aussi présent au Brésil, certains observateurs s’interrogaient quant aux raisons du silence marqué d’Envol Vert à l’égard du géant de la distribution. D’autant plus que Carrefour a été accusé de complicité dans la déforestation en Amazonie, notamment par une enquête du média Disclose en juillet 2020 puis, plus tard, par l’ONG Mighty Earth.
Si aucun financement direct d’Envol Vert par l’enseigne et n’a été avéré, plusieurs médias s’étaient alors penchés sur les liens unissant l’ONG à Carrefour, mettant en lumière le fait que leur trésorière et administratrice avait été employée pendant dix ans par le groupe d’Alexandre Bompard. Un second membre d’Envol Vert présente également des liens avec Carrefour : il s’agit de Boris Patentreger, qui avait effectué une mission de conseil en 2015 pour l’enseigne française dans le cadre d’un projet de Cacao en Côte d’Ivoire.
Les accusations de collusion entre Envol Vert et Carrefour avait provoqué une réponse de l’ONG. L’association y confirmait en effet la mission effectuée par son fondateur Boris Patentreger pour le groupe Carrefour, mais également la présence, au sein de son conseil d’administration, de l’ancienne salariée de la direction RSE du distributeur.
Des accusations fondées sur un rapport douteux de l’EIA
Entre le début de la campagne menée par Envol Vert contre le groupe Casino (2019), et les années 2020, notamment justifée par la forte présence du distributeur au Brésil, alors premier distributeur français du pays, le rachat du distributeur local Grupo BIG par le groupe Carrefour plaçait ce dernier devant le groupe Casino en termes de parts de marchés. Difficile donc à ce moment-là pour Envol Vert de justifier son tropisme particulier pour le groupe Casino et d’épargner le groupe Carrefour.
Une fois que ce basculement de la mobilisation d’Envol Vert sur la Colombie a été effectué, les difficultés à rassembler des éléments crédibles pour porter ses accusations ne se sont toutefois pas arrêtées, poussant l’ONG à commettre des erreurs grossières. Sur la base d’un rapport de mail 2021 produit par l’ONG britannique Environmental Investigation Agency (EIA), Envol Vert accusait le groupe Casino de se fournir auprès de fermiers impliqués dans la déforestation illégale du parc national du Chiribiquete, où les activités agricoles sont fortement encadrées et la forêt protégée. Les accusations adressées au groupe Casino reposaient essentiellement sur le témoignage d’un fermier, lui-même accusé d’avoir illégalement déforesté des hectares de forêt amazonienne pour faire paître ses troupeaux de bovins, qui s’affirmait fournisseur du distributeur… mais ledit fournisseur s’est par la suite rétracté. Un sujet qui a notamment fait l’objet d’un article dans le média de référence colombien El Tiempo. Il apparaît en outre que l’EIA ait grossièrement amplifié le montant des commandes de viandes mensuelles d’Éxito à ses fournisseurs. D’après l’ONG, le fournisseur incriminé livrerait 1 000 animaux par mois quand le montant moyen des commandes par fournisseur est en réalité inférieur à 200…
Sur un plan plus général, la campagne menée par Envol Vert contre le groupe Casino soulève des interrogations quant aux objectifs et méthodes des ONG. Il apparaît en effet que celles-ci soient parfois tentés de sacrifier la rigueur et l’exactitude sur l’hôtel du buzz et de la visibilité médiatique : s’en prendre à un grand groupe (jugé coupable par défaut) devient un objectif en soi, au mépris des faits.