Le Portugal surprend : comment le pays est-il passé à l’excédent et réduit sa dette ?

Le Portugal enregistre une baisse remarquable de sa dette publique et affiche désormais un excédent budgétaire, deux indicateurs enviés en Europe. Ce redressement économique suscite l’intérêt des observateurs, qui cherchent à comprendre les recettes de ce succès.

Excédent portugais : la face émergée de l’iceberg

La scène économique européenne, en cette année 2025, connaît de fortes turbulences. Pourtant, un pays suscite l’étonnement : le Portugal, qui déjoue les pronostics avec un deuxième excédent budgétaire consécutif. Alors que la plupart des voisins européens peinent à contenir leurs déficits, Lisbonne affiche une trajectoire que certains qualifieraient presque de miraculeuse. Pourtant, derrière cette réussite chiffrée, se cache une réalité moins romanesque.

Une austérité draconienne en coulisses

Pour parvenir à un tel équilibre, le Portugal n’a pas ménagé ses efforts. Les autorités ont recouru à une politique d’austérité rigoureuse : réduction drastique du nombre de fonctionnaires, suppression des primes annuelles comme les 13e et 14e mois, augmentation notable de la TVA, privatisations à grande échelle, report de l’âge de départ à la retraite et diminution du SMIC. Cette potion amère n’a épargné personne, ni les agents publics – dont les salaires ont chuté de 30 % du jour au lendemain – ni les nouveaux retraités, remplacés uniquement à la marge. « Il y a eu une baisse des dépenses très forte, trop forte même… cela eut un aspect récessif », analyse Anne-Sophie Alsif du Bureau d’informations et de prévisions économiques (BIPE). D’autres experts, comme Anne Bucher, rappellent que ce « miracle » portugais fait suite à une crise économique majeure et s’est construit sur des choix difficiles.

L’étranger, moteur et talon d’Achille

Autre levier majeur : le recours massif aux investissements extérieurs. Le fameux « golden visa » a attiré capitaux et talents venus du monde entier, contribuant à doubler la part des investissements directs étrangers dans le PIB portugais entre 2008 et 2024. Pour obtenir un titre de séjour – voire la nationalité –, il suffisait d’investir des sommes considérables dans la recherche ou l’immobilier local. En conséquence, la population étrangère avec permis de séjour représente désormais 15 % du pays. Toutefois, ce pari présente aussi ses revers : flambée du prix du logement (+124 % en dix ans), précarisation des locaux et dépendance accrue aux flux internationaux.

Voici quelques conséquences notables :

• Crispation autour de l’accès au logement.
• Dépendance aux investisseurs étrangers volatiles.
• Difficultés d’intégration économique locale.

Des fragilités structurelles persistantes

Malgré ces résultats flatteurs sur le papier, plusieurs faiblesses demeurent. La main-d’œuvre locale reste peu qualifiée, la productivité stagne et le problème démographique s’aggrave. « Le Portugal doit absolument investir massivement et se réindustrialiser pour espérer maintenir sa trajectoire actuelle », souligne Anne-Sophie Alsif. À cela s’ajoute un défi redoutable : attirer puis retenir encore davantage d’immigrés qualifiés afin d’assurer une croissance annuelle durable supérieure à 3 %, selon une récente étude universitaire.

Entre félicitations enthousiastes et prudence analytique, il faudra sans doute bien plus qu’une potion magique ou qu’un détour d’Astérix pour garantir au Portugal un avenir stable sur le long terme.