Emmanuel Macron lance des pistes de réformes pour prendre le virage du numérique
Fonds de pension à la française, démarches administratives facilitées et dérégulation de nouveaux secteurs: Emmanuel Macron veut préparer l’économie française à «ne pas rater» la bataille du numérique, et s’attaquer au passage aux «corporatismes» et au «statu quo».
Le ministre de l’Economie a ébauché lundi les contours de son projet de loi, baptisé #noé, destiné à favoriser les «nouvelles opportunités économiques», et dont le contenu sera détaillé «mi-décembre».
«Je ferai une première série de propositions à la mi-décembre, puis un point début janvier et il y aura un texte de loi présenté en janvier» en conseil des ministres, a-t-il précisé lors d’une rencontre avec des acteurs de l’économie numérique, à Bercy.
Côté méthode, Emmanuel Macron veut s’appuyer sur les acteurs du secteur, pour parvenir à «un diagnostic partagé».
«Je ne sais pas quelles sont les bonnes réformes sur ce sujet, peut-être même qu’il n’y en a pas», a avancé le ministre, plaidant à plusieurs reprises pour ne pas «surréguler» ces nouvelles formes d’activité mais au contraire laisser plus de place aux initiatives.
Il s’agit tout d’abord, selon lui, d’une «bataille culturelle». «Il faut en finir avec les corporatismes», «en finir avec la préférence pour le statut quo» et «aider les gens à réussir», a-t-il insisté.
Après les interventions d’une dizaine d’entrepreneurs, dont les patrons de Blablacar Frédéric Mazzella et de la biotech Eligo Bioscience Xavier Duportet, Emmanuel Macron a malgré tout dévoilé plusieurs mesures qui figureront dans le projet de loi.
Face au manque de capitaux de certaines start-ups françaises, il a appelé à adapter les structures de financement et annoncé que le gouvernement envisageait la création de «fonds de pension à la française» pour canaliser une partie de l’épargne vers les secteurs concernés.
«Il faut ramener le capital qui est celui de nos épargnants vers le financement de l’économie réelle. (…) Il faut développer une forme de fonds de pension à la française, et adapter le cadre fiscal, et c’est cela aussi que je vais proposer dans les prochaines semaines», a déclaré le ministre de l’Economie, sans plus de précisions.
Bataille des talents
Concernant les participations de l’Etat, «on doit beaucoup plus investir de l’argent public dans l’innovation et ces nouvelles formes (d’activité) qu’on a évoquées aujourd’hui et beaucoup moins le garder dans des métiers ou des formes d’entreprises classiques», a-t-il estimé.
M. Macron a également annoncé de nouvelles incitations fiscales pour attirer ou retenir les personnes les plus qualifiées en France. «On a commencé à le faire avec les actions de performance (…) Il faut aller plus loin, on fera de nouvelles propositions pour répondre à ce défi de la bataille des talents», a-t-il expliqué.
Le ministre a aussi dit vouloir poursuivre la dérégulation de certains secteurs, entamée dans la première loi Macron avec le secteur des autocars ou l’assouplissement du travail du dimanche. Pour encourager les créations d’entreprises, les «simplicités déclaratives» aujourd’hui réservées aux autoentrepreneurs devraient être étendues à tous les entrepreneurs individuels et le passage d’un statut à l’autre devrait être facilité.
Il a également jugé que les pré-requis pour exercer certaines professions n’étaient «pas toujours» justifiées, citant l’exemple du laveur de voitures qui doit avoir un BEP en carrosserie ou de la personne gardant des personnes âgées à domicile qui doit disposer d’un local professionnel.
«La France, qui se distingue par sa difficulté à créer des emplois peu qualifiés, peut profiter de cette dynamique en levant les barrières à l’accès à ces activités», argumente Bercy dans une présentation.
Globalement, la loi #noé devra «faciliter l’émergence de ces nouveaux modes, de ces nouvelles technologies» qui bouleversent l’économie, faute de quoi la France se contentera d’être un marché comme les autres pour les géants du numérique étrangers, notamment américains.
«La logique (de ces annonces) est porteuse d’espoir, maintenant il faut concrétiser, et vite», a réagi Christelle Martin, déléguée générale du groupement des professions de services, interrogée par l’AFP. «Au-delà de la révolution numérique, il faut la révolution des services», a-t-elle plaidé, saluant la prise en compte de thèmes comme la pluriactivité.