Sida : Le traitement préventif disponible en décembre pour les personnes à risque
Le Truvada, ce traitement préventif contre le sida, arrive. La porte vient de s’entrouvrir, et même si le pas est encore limité, la décision ministérielle, annoncée mardi, marque un tournant. Ce lundi après-midi, en effet, à l’Assemblée nationale, lors du débat sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, et en réponse à une question, Marisol Touraine a annoncé que, «sous certaines conditions», le Truvada pourrait être prescrit pour éviter aux personnes à risques d’être infectées par le virus du sida. «J’y suis favorable, a-t-elle précisé.Et cela sera effectif au cours de la première quinzaine de décembre. Et j’ai décidé que ce traitement sera pris en charge à 100% par l’Assurance maladie.»
Le Truvada c’est quoi ?
L’emtricitabine/ténofovir est un agent antirétroviral contre le VIH-1 et le VIH-2, composé d’emtricitabine (nom commercial Emtriva) et de fumarate de ténofovir disoproxil (nom commercial Viread). Ces deux molécules sont des inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (NRTI). Il est prescrit lorsque le patient est déclaré séropositif, mais il est également étudié en prévention pour des populations précises, dans le cadre d’essai sur les PreP et autorisé dans cette prescription aux États-Unis. Il est vendu sous le nom Truvada.
L’emtricitabine/ténofovir est composé de 200 mg d’emtricitabine et de 300 mg de fumarate de ténofovir disoproxil. Le comprimé est administré par voie orale, une seule fois par jour, de préférence avec un repas, même léger. Pour suivre la trithérapie, ce médicament est souvent combiné avec un inhibiteur non-nucléosidique de la transcriptase inverse ou un autre agent antirétroviral contre le VIH. Le comprimé contient aussi des éléments non médicinaux qui peuvent avoir une importance clinique comme le lactose monohydraté et l’amidon prégélatinisé.
Le patient commence à prendre ce traitement soit en prophylaxie, soit lorsque le nombre de lymphocytes T CD4+ dans son sang atteint entre 200 et 350 cellules par millilitre, à la suite de l’infection par le VIH.
L’emtricitabine et le fumarate de ténofovir disoproxil sont deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse. Cependant, ils ne sont pas l’analogue du même nucléoside et donc, le mécanisme d’action diffère légèrement. Les nucléosides doivent être phosphorylés dans les cellules pour devenir des nucléotides et être intégrés dans la réplication de l’ADN par la transcriptase inverse. (Source Wikipedia)
« probablement au cours de la première quinzaine de décembre »
« Je suis favorable à la publication d’une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du Truvada, un médicament qui doit nous permettre d’avancer significativement dans la lutte contre le VIH », a déclaré la ministre de la Santé Marisol Touraine à l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2016.
La publication de cette RTU – qui permet à titre transitoire d’utiliser un médicament en dehors des champs de prescription prévus – devrait se faire « probablement au cours de la première quinzaine de décembre » et le Truvada sera pris en charge à 100% « au début de l’année 2016 », a-t-elle précisé.
Le Truvada est une combinaison d’antirétroviraux du laboratoire américain Gilead, qui a été mis sur le marché en 2005 en tant que traitement pour les malades du sida.
La France est le deuxième pays après les Etats-Unis à prendre la décision d’autoriser l’utilisation du Truvada comme « prophylaxie pré-exposition » ou PrEP, c’est-à-dire comme traitement préventif. Selon Mme Touraine, le médicament ne pourra être prescrit que par des médecins spécialisés ou dans des centres de dépistage, avec un accompagnement spécifique.
« C’est une immense satisfaction pour nous de voir ce dossier aboutir. Cela signifie que très bientôt, nous allons pouvoir accompagner partout en France les personnes qui ont besoin d’un nouvel outil de prévention adapté à leur situation de vie », s’est aussitôt réjouie l’association de lutte contre le sida Aides.
Jean-Luc Romero, le président d’Elus locaux contre le sida (ELCS) a pour sa part salué « une révolution dans la prévention en France », tandis que l’Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) a estimé que « la France vient de franchir un pas décisif dans la lutte contre le sida ».
Le préservatif toujours d’actualité
Dans son annonce faite à huit jours de la journée mondiale du sida, Mme Touraine a souligné que le Truvada « ne doit pas se substituer au préservatif ».
« Mais il permet de répondre à des situations dans lesquelles le préservatif ne trouve pas sa place, ou de répondre à des personnes qui ne peuvent pas pour différentes raisons en avoir un usage systématique, alors que ces personnes évoluent au sein de groupes où la prévalence et l’incidence du VIH est élevée », a-t-elle dit.
Elle a souligné qu’il y avait « urgence à agir » dans le groupe des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), « le seul groupe au sein duquel le nombre des nouvelles contaminations au VIH ne baisse pas ».
En France, où plus de 500 personnes découvrent chaque mois leur séropositivité au VIH, les associations anti-sida et gay réclamaient depuis des mois l’autorisation de ce traitement préventif relativement onéreux (500 euros la boîte de 30 comprimés).
Selon des chiffres de l’Institut de veille sanitaire (InVS), les nouvelles découvertes de séropositivité sont en augmentation sensible chez les jeunes HSH qui ont 200 fois plus de risque de contracter le VIH qu’une personne de la population générale.
La décision française s’appuie sur une série d’études réalisées ces dernières années sur l’efficacité avérée de la PrEP.
Mais alors que des essais américain et britannique ont validé un traitement donné en continu, l’essai français Ipergay dont les résultats ont été rendus publics au début de l’année, a montré qu’une prise à la demande, avant et après des rapports sexuels à risques, avait un taux d’efficacité de 86%, similaire à celui de l’étude britannique.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande pour sa part depuis 2014 que le traitement préventif soit proposé aux homosexuels très exposés.
En septembre, la recommandation a été étendue à toutes les populations exposées à un risque « substantiel » (incluant les utilisateurs de drogues et les prostituées).