Ikea dans le collimateur de la Commission européenne pour ses montages fiscaux
Les eurodéputés verts dénoncent la « stratégie de planification fiscale agressive » du suédois Ikea, numéro un mondial de l’ameublement, dans un rapport d’enquête que la Commission européenne a promis samedi d’étudier en détail.
Ikea affirme « payer ses impôts conformément aux législations nationales et internationales »
Ce rapport montre notamment « comment l’entreprise multinationale suédoise s’est structurée pour soustraire à l’impôt plus d’un milliard d’euros ces six dernières années au détriment de divers États européens », selon les élus du groupe Verts/ALE au Parlement européen.
« IKEA a essentiellement utilisé des échappatoires fiscales qu’offrent les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg », écrivent-ils dans un communiqué. « La Commission européenne a pris bonne note de ce rapport et va l’étudier en détail », a déclaré à l’AFP Vanessa Mock, porte-parole de la Commission, chargée des services financiers et de la fiscalité.
Interrogé par l’AFP sur le rapport des eurodéputés, Ikea a affirmé « payer ses impôts conformément aux législations nationales et internationales », dans un courrier électronique. « Nous tenons à continuer à développer nos activités en Europe et nous nous réjouissons d’échanger sur une harmonisation du système fiscal international », a-t-il ajouté.
« Au cours de l’exercice financier 2015, Ikea Group a payé des impôts pour un montant total de plus de 1,5 milliard d’euros, et sur les cinq dernières années (entre 2011 et 2015), le total s’élève à environ 7,5 milliards d’euros », a-t-il détaillé.
Dans ce rapport est décrite l’une des techniques privilégiées du groupe, selon les députés verts: chaque magasin de la chaîne suédoise procède au paiement de redevances (« royalties ») à une filiale basée aux Pays-Bas qui joue seulement un rôle de « conduit ». Les redevances entrent et sortent des Pays-Bas non taxées et aboutissent en grande partie au Liechtenstein.
« Rien que pour l’année 2014 », le rapport d’enquête évalue « les pertes fiscales à 35 millions d’euros pour l’Allemagne, 24 millions d’euros pour la France et 7,5 millions d’euros pour la Belgique ».
Les eurodéputés verts ont envoyé une lettre à Margrethe Vestager, Commissaire européenne à la concurrence, et à Pierre Moscovici, Commissaire européen à la fiscalité, dans laquelle ils présentent leurs conclusions. Ils les invitent à lancer une procédure d’examen afin de vérifier l’existence d’une possible infraction à la législation européenne sur la concurrence.
LuxLeaks avait mis en lumière un système d’évasion fiscale à grande échelle des multinationales
« La commission européenne salue le fait que la lutte contre la fraude fiscale est devenue une priorité politique essentielle, aussi bien dans l’UE qu’au niveau international », a ajouté Mme Mock.
Depuis l’éclatement du scandale LuxLeaks en novembre 2014, qui avait profondément terni l’entrée en fonction du Luxembourgeois Jean-Claude Juncker en tant que nouveau président de la Commission, Bruxelles a accentué sa lutte contre l’opacité fiscale.
LuxLeaks avait mis en lumière un système d’évasion fiscale à grande échelle des multinationales et particulièrement le rôle joué par certains Etats, comme le Luxembourg, à une époque où M. Juncker était à la fois Premier ministre et ministre des Finances.
En octobre 2015, la Commission a fait adopter par les 28 Etats membres le principe de l’échange automatique d’informations sur les accords fiscaux passés entre Etats et multinationales. Et fin janvier, elle a lancé une vaste offensive contre l’optimisation fiscale des multinationales qui prive chaque année les Etats de l’UE de dizaines de milliards d’euros.