La France se figera à midi pour une minute de silence
La France, qui renoue lundi avec son quotidien après les plus sanglants attentats de son histoire, se figera à midi pour une minute de silence, au lendemain d’une première riposte de Paris qui a bombardé un fief du groupe Etat islamique (EI) en Syrie.
De leur côté, les enquêteurs poursuivent leur travail d’identification des kamikazes jihadistes, qui ont causé la mort d’au moins 129 personnes, et de leurs connexions en Belgique et Syrie. Sur le plan politique, le président François Hollande s’adressera à 16H00 aux députés et sénateurs réunis en Congrès à Versailles pour « rassembler la Nation dans cette épreuve ».
Après un weekend de sidération et de recueillement, les Français tenteront de reprendre le cours d’un quotidien désormais placé sous très haute surveillance. Malgré l’état d’urgence décrété vendredi soir, « il faut continuer à vivre », a exhorté dimanche le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve.
En région parisienne, les écoles fermées samedi rouvrent lundi matin, avant les musées, salles de spectacle et autres établissements culturels à 13H00. Ce retour pénible à la « normale » sera toutefois marqué par une minute de silence à travers tout le pays à 12H00, en hommage aux victimes -au moins 129 morts et 352 blessés- des attaques revendiquées par l’organisation État islamique (EI) qui ont frappé vendredi soir le Stade de France, la salle de spectacle du Bataclan et plusieurs bars et restaurants parisiens.
Cent trois victimes ont d’ores et déjà été identifiées, a indiqué Manuel Valls.
Après la revendication des attentats par l’Etat Islamique (EI), la France a lourdement bombardé dimanche soir le fief de l’organisation jihadiste à Raqa, dans le nord de la Syrie, détruisant un poste de commandement et un camp d’entraînement.
François Hollande avait averti samedi que la France serait « impitoyable » sur les terrains intérieur et extérieur après des attentats qualifiés « d’acte de guerre ». Les enquêteurs poursuivent, eux, leurs investigations sur les « trois équipes de terroristes » qui auraient, selon la justice, mené ces attaques.
Après avoir identifié Omar Ismaïl Mostefaï, né à Courcouronnes (Essonne) et fidèle d’une mosquée de la banlieue de Chartres, comme un des assaillants du Bataclan, deux autres des sept kamikazes ont été identifiés dimanche. Tous deux, résidant en Belgique, sont de nationalité française.
L’un, Bilal Hadfi (30 ans) est l’un des trois qui se sont fait sauter au Stade de France. L’autre, Brahim Abdeslam (31 ans) s’est fait exploser boulevard Voltaire, sans faire de victimes. Ce dernier fait partie d’une fratrie sur laquelle se concentrent les enquêteurs: un de ses frères, Mohamed, a été placé en garde à vue en Belgique.
Les services antiterroristes sont sans nouvelle d’un troisième, Salah, qui pourrait être un des kamikazes ou en fuite, selon des sources proches du dossier. La justice belge a émis un mandat d’arrêt international et la police française a lancé un appel à témoin à l’encontre de cet « individu dangereux ». Il a été identifié comme ayant loué une Polo noire immatriculée en Belgique retrouvée garée devant le Bataclan, où une prise d’otage sanglante a fait au moins 89 morts.
Brahim a de son côté loué une Seat noire, également immatriculée en Belgique et retrouvée à Montreuil, en proche banlieue parisienne, avec à son bord trois kalachnikov, onze chargeurs vides et cinq pleins.
Les liens avec la Belgique sont désormais clairs. « Les attentats abjects qui nous ont frappés vendredi ont été préparés à l’étranger et ont mobilisé une équipe d’acteurs situés sur le territoire belge et qui ont pu bénéficier, l’enquête le dira, de complicités en France », a affirmé Bernard Cazeneuve dimanche, après un entretien à Beauvau avec son homologue belge Jan Jambon.
Sept personnes sont en garde à vue en Belgique, où l’enquête se concentre sur la commune bruxelloise de Molenbeek, considérée comme une plaque tournante des jihadistes en Europe.
Les enquêteurs veulent aussi établir précisément les connexions existant avec la Syrie.
Objet d’une fiche S de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) en 2010, mais passé sous les radars depuis, Mostefaï a très vraisemblablement séjourné en Syrie entre 2013 et 2014. Hadfi y est aussi allé, selon une source proche de l’enquête, et la question se pose pour d’autres assaillants, identifiés ou en voie de l’être.
Sur le plan politique, après avoir consulté individuellement les dirigeants des différentes formations politiques dimanche, François Hollande s’adressera aux 577 députés et 348 sénateurs, réunis en Congrès à Versailles, pour réaffirmer sa détermination face à la menace terroriste et « rassembler la Nation ».
Mais cette réunion solennelle prendra une dimension politique.
Le parti Les Républicains a demandé -et obtenu- que les groupes parlementaires puissent aussi faire entendre leur voix à cette occasion. Chacun d’entre eux s’exprimera dix minutes à l’issue du discours, une fois le chef de l’Etat parti.
Dix mois après l’unanimité politique suscitée par les attentats de janvier, quelques voix dissonantes se font entendre, notamment celle de l’ancien chef de l’Etat Nicolas Sarkozy. Le président des Républicains a notamment demandé « des modifications drastiques de notre politique de sécurité », avec bracelets électroniques et mise en résidence surveillée pour toutes les personnes fichées comme radicalisées, ainsi qu’une « nouvelle politique de l’immigration » au niveau européen.
Il a affirmé vouloir « l’unité nationale, la solidarité nationale pour une meilleure sécurité, pas simplement pour faire des discours ». Les témoignages de solidarité se sont poursuivis dans le monde entier. Ainsi, les drapeaux américains seront mis en berne à la Maison Blanche et sur d’autres bâtiments officiels à travers le pays et à l’étranger, jusqu’au coucher du soleil jeudi.