Le départ surprise d’Alexandre de Juniac d’Air France-KLM laisse en suspens les questions sur l’avenir de la compagnie
Le départ surprise d’Alexandre de Juniac d’Air France-KLM laisse en suspens les questions sur l’avenir de la compagnie franco-néerlandaise, qui a regagné une partie du terrain perdu face à ses concurrentes, les low-cost et les compagnies du Golfe, mais n’a pas encore retrouvé son lustre d’antan.
Plusieurs noms circulent pour le poste
“Son successeur n’est pas encore connu mais le Comité des nominations dispose de plusieurs mois pour trouver un remplaçant qui devrait, selon toute vraisemblance, venir de l’extérieur”, relèvent les analystes du courtier Aurel BGC.
Plusieurs noms circulent: Fabrice Brégier, le patron d’Airbus, Guillaume Pépy, celui de la SNCF, Thierry Antinori, le numéro deux de la compagnie du Golfe Emirates, ou Philippe Boisseau, qui vient de quitter Total.
Alexandre Bompard, le PDG de la Fnac, Nicolas Dufourq, directeur général de BpiFrance, sont également cités, mais le choix pourrait aussi se porter en interne: Frédéric Gagey, le PDG d’Air France, Lionel Guérin, patron de HOP, la filiale régionale, ou encore le néerlandais Pieter Elbers, président du directoire de KLM.
Restaurer le dialogue social
“On espère que le successeur de M. de Juniac saura à la fois restaurer la confiance avec les personnels, parce qu’on ne peut pas diriger une compagnie aérienne contre ses pilotes en particulier et ses salariés en général, et qu’il saura aussi s’attacher au développement d’Air France, qui est une entreprise qui fonctionne, qui a du potentiel”, a résumé à l’AFP Véronique Damon, secrétaire générale du SNPL, le puissant syndicat de pilotes.
Jugé brutal et cassant par ses détracteurs mais admiré pour sa vision stratégique et sa pugnacité par ses partisans, M. de Juniac laisse une entreprise qui “est sortie de la zone de risque, mais n’est pas revenue dans le peloton des 3 ou 4 meilleures mondiaux”, a-t-il expliqué sur RTL mercredi.
“Dans une course menée par des géants, si vous ne comptez pas parmi ces géants, vous déclinez”, a-t-il estimé.
Prise en étau entre les compagnies low cost en Europe, Ryanair et easyJet en tête, et celles du Golfe sur le long-courrier, la compagnie en difficultés a consenti d’importants sacrifices, comme la suppression de 5.500 postes.
Mais cette stratégie de réduction des coûts et le développement de la filiale à bas coûts Transavia a fini par creuser un fossé entre lui et les syndicats, notamment de pilotes, qui paraissait infranchissable et explique en partie son départ.
Cette hostilité a atteint son paroxysme en octobre, lorsque le directeur des ressources humaines a dû fuir des manifestants en colère, en escaladant un grillage devant le siège d’Air France à Roissy, la chemise déchirée.
Pour Miguel Fortea, numéro un de la CGT Air France, Alexandre de Juniacrestera comme “l’homme de la stratégie de la division” entre les catégories de personnel. Avec lui, le dialogue social c’était “soit on est d’accord avec lui soit c’est le bras de fer”.
De l’autre côté du spectre, Ronald Noirot, de la CFE-CGC, s’est dit “un peu désolé” du départ d’un “grand patron qui a su faire bouger les lignes”, “a “pris des décisions courageuses” et “avait le sens de l’écoute”.
Pour Béatrice Lestic, de la CFDT, son départ “dégage un peu le paysage interne et tout ce qui polluait les débats puisque Alexandre de Juniac avait réussi à cristalliser sur son nom un certain nombre de ressentiments”. Ce qui compte vraiment, “c’est qui va le remplacer”, selon Mme Lestic.
Air France-KLM chute de près de 5%
Le titre du groupe Air France-KLM, chutait de près de 5% mercredi matin à la Bourse de Paris, après l’annonce surprise la veille du départ de son PDG, Alexandre de Juniac, qui va devenir directeur général de l’Association du transport aérien international (IATA).
A 10H53 (09H53 GMT), la valeur perdait 4,63% à 7,79 euros, dans un marché en hausse de 0,49%.
Même si “l’arrivée d’Alexandre de Juniac à la tête d’IATA est favorable au secteur”, le groupe se trouve face à la “nécessité de trouver au plus vite un remplaçant”, a souligné un courtier parisien.
M. de Juniac a informé le conseil d’administration de la compagnie franco-néerlandaise “de la proposition qui lui a été faite ce mardi 5 avril 2016 par le Conseil des gouverneurs de l’Association du Transport Aérien International (IATA) de devenir (son) prochain directeur général”, a indiqué le groupe dans un communiqué mardi.
Le départ après trois ans de mandat de ce patron, charismatique pour les uns, trop clivant pour les autres, est une surprise.
“Comment ne pas relier le départ surprise d’Alexandre de Juniac avec l’incapacité d’Air France à accepter la réforme?”, s’interrogent pour leur part les analystes du courtier Aurel BGC.
Il quitte un groupe en voie de redressement mais encore fragile. Air France-KLM se trouve comme d’autres compagnies historiques prise en étau entre la concurrence féroce des low-cost en Europe, Ryanair et easyJet en particulier, et sur le long courrier de celle des compagnies du Golfe, Emirates ou Qatar Airways.
Face aux low-costs, il a cherché à développer la filiale Transavia d’Air France-KLM, et a opposé aux secondes une montée en gamme.
“Son successeur n’est pas encore connu mais le Comité des nominations dispose de plusieurs mois pour trouver un remplaçant qui devrait, selon toute vraisemblance, venir de l’extérieur”, relève Aurel BGC.